Analyse du rapport du Professeur Mario Monti:

Il y a presque un an (Octobre 2009), le Président de la Commission Européenne, Jose Manuel Barroso, a chargé le Professeur Mario Monti de lui remettre une étude ayant pour objectif l’identification et la proposition d’idées neuves pour une Nouvelle Stratégie relative au Marché Commun. L’idée générale était d’intégrer les suggestions du Professeur Monti dans la stratégie de « l’Europe de 2020 », qui vise à renforcer l’économie de l’Union Européenne pour les dix années suivantes.

 

 

Le Professeur Monti n’est pas un débutant en matière d’affaires Européennes. Comme vous le savez, il fut Commissaire Européen, de 1994 à 1999, pour le Marché Intérieur, les Services Financiers, l’Intégration Financière, les Droits et Taxes Douanières, lorsque le Collège des Commissaires était dirigé par le Professeur Romano Prodi. Il fut également membre de la Commission Européenne, responsable pour la Concurrence, de 2001 à 2004. Mario Monti est actuellement le Président de la prestigieuse « Università Commerciale L.Bocconi in Milano » et l’un des membres « séniors » de l’institution européenne de droit privé (Think Tanks), « Bruegel ».

 

Le Professeur a remis ce rapport le 9 Mai 2010. Le texte inclue tous les domaines possibles ayant un intérêt pour le Marché Commun.

Pour nos professions, il est d’un grand intérêt que le Professeur Monti évoque la question de la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles, dans plusieurs parties de son étude. Dans la suite de cette analyse, nous tenterons de faire ressortir les principales idées introduites par son rapport, et plus spécialement celles étant en rapport avec notre secteur.

 

Nous diviserons notre analyse en deux parties distinctes.

 

Dans un premier temps, nous présenterons les idées du Professeur Monti concernant les actuelles mises en garde quand à l’application de la Directive Services.

Nous discuterons ensuite des conclusions qu’il dresse sur la mobilité des travailleurs, en se concentrant sur la reconnaissance des qualifications professionnelles.

 

 

  1. Le Marché Commun des Services : quels problèmes, quelles solutions ?

 

Le secteur des services est d’une importance cruciale pour les économies Européennes (près de 70% du PIB de l’Union Européenne). Néanmoins, ses marchés demeurent fortement fragmentés car seulement 20% de ces services fournis à l’intérieur de l’Union Européenne ont une dimension transfrontalière. Pour faire face à ce problème, le Professeur Monti propose d’agir dans différentes directions :

 

  • Une exécution rapide de la Directive Services : tâche qui devrait demander aux États membres de fournir plus d’efforts, même si les résultats actuels sont plutôt encourageants (voir le Télégramme du CEPLIS N° 1/10). La Commission Européenne a un rôle à jouer, d’une part en adoptant les mesures nécessaires et en maintenant la pression sur les États Membres, et d’autre part en tenant les autres institutions (le Parlement Européen ainsi que le Conseil) et les parties prenantes régulièrement informés.

 

  • Réduire les entraves relatives aux dispositions sur les soins de santé transfrontaliers : le rapport Monti précise que le marché des services s’étend au-delà des secteurs couverts par l’actuel « Directive Services ». Il suggère, d’accorder une attention particulière aux zones non couvertes par la Directive, et ce spécialement pour le secteur des soins de santé. Le Professeur Monti précise la nécessité de rapidement adopter la Directive sur le droit des patients en matière de soins de santé transfrontaliers.

 

 

2.La mobilité des travailleurs en Europe : défis et solutions.

 

Parmi d’autres considérations, le rapport Monti propose un débat sur la question de la reconnaissance des qualification professionnelles. Le Professeur introduit le sujet en précisant que : « la complexité de la reconnaissance international des qualifications professionnelles constitue un obstacle majeur à la hausse de la mobilité transfrontalière des travailleurs », regrettant ainsi que l’actuelle reconnaissance automatique des qualifications ne s’applique qu’à seulement sept professions, alors qu’il en existe plus de 800 ! L’ancien Commissaire considère que le cadre légal de la Directive sur la Reconnaissance des Qualifications Professionnelles doit être clarifié et renforcé.

Quelles sont ses principales ses principales recommandations sur ce sujet ?

 

 

  • Mario Monti pense que « la possibilité que la reconnaissance automatique des qualifications de nouvelles professions devraient s’étendre à de nouveaux secteurs, en plus de ceux auxquels appartiennent déjà les sept professions » visant particulièrement les nouvelles professions requises pour les industries verte et numérique afin de faciliter la mobilité des travailleurs très qualifiés.

 

  • L’étude insiste également sur l’importance du développement d’une « Taxinomie Européenne des qualifications et compétences ». Un tel système pourrait assurer la parfaite compréhension, partout en Europe, des qualifications et compétences, d’une part des demandeurs d’emplois, et d’autre part de celles exigées par les offres d’emploi, rendant ainsi ces qualifications et compétences plus facilement transférables.

 

  • L’étude comporte plusieurs autres recommandations spécifiques : trouver une solution à l’obstacle que représente les taxes au travail transfrontalier; renforcer la transparence dans la reconnaissance des qualifications et des compétences; et développer des systèmes de qualifications nationaux.

 

Par le passé, Mario Monti a su se faire connaître comme un opposant farouche aux réglementations professionnelles qui, selon lui, constituent un obstacle à l’efficacité du Marché Commun et une entrave à la libre concurrence. Le rapport qu’il a proposé, en tant que Commissaire responsable pour la Concurrence, a porté à la controverse et les différentes professions ont été contraintes d’user de leurs contacts, notamment au Parlement Européen, afin de souligner les spécificités de ce secteur qui n’est pas uniquement tourné vers le profit. Ce nouveau rapport amène certes des idées nouvelles qui pourraient éventuellement s’avérer bénéfiques pour notre secteur, mais n’est cependant pas dépourvu de tout danger. Le défi sera alors de travailler vers une système de reconnaissance mutuelle plus efficace sans perdre de vue le fait de devoir constamment rappeler à la Commission le rôle important que nos professions ont joué, et seront toujours amenées à jouer, en tant qu’intermédiaires dans les relations entre les citoyens et les Etats démocratiques, ainsi qu’en tant que gardiens de la santé publique.

 

Une discussion approfondie de ce rapport – avec la possible participation des Eurodéputés, dans le cadre d’un futur séminaire du CEPLIS, constituerait une aide précieuse afin que nous puissions déterminer la façon optimale de tirer profit de l’étude de Monti, par une sélection des traits essentiels de son rapport.

 

 

 

Pour consulter le rapport, veuillez, s’il vous plaît, vous diriger vers : http://ec.europa.eu/bepa/expertises/visitor-programs/mario_monti/index_en.htm